Lucy Maud Montgomery, figure emblématique de la littérature canadienne, a laissé un héritage qui continue de fasciner des générations de lecteurs. Son œuvre la plus célèbre, Anne… la maison aux pignons verts, a propulsé cette écrivaine dans la lumière. Mais qui se cache vraiment derrière cette plume ?
Une enfance marquée par la solitude
Lucy Maud Montgomery naît le 30 novembre 1874 sur l’Île-du-Prince-Édouard, une province canadienne qui servira plus tard de décor à ses romans. Sa vie bascule lorsqu’elle perd sa mère, emportée par la tuberculose alors qu’elle n’a que vingt-et-un mois. Son père, accablé de chagrin, la confie à ses grands-parents.
C’est à Cavendish, au cœur de paysages bucoliques, qu’elle grandit. Mais la vie n’y est pas rose : Lucy Maud est une enfant solitaire, souvent en proie à l’ennui. Pour échapper à cette morosité, elle se crée des amis imaginaires et invente des mondes féériques. Une imagination fertile qui façonnera son talent littéraire.
Un parcours académique fulgurant
Brillante élève, Montgomery poursuit des études au Prince of Wales College, où elle décroche son diplôme d’enseignante en un an au lieu de deux. Son besoin d’indépendance la pousse à devenir institutrice, un métier qu’elle n’aime guère, mais qui lui laisse le temps d’écrire. À cette époque, elle commence à publier ses premiers poèmes et nouvelles dans des magazines. L’ébauche de ce qui deviendra Anne prend forme en 1905.
Le triomphe d’Anne Shirley
En 1908, Montgomery publie Anne… la maison aux pignons verts. Le succès est fulgurant. Anne Shirley, jeune orpheline pétillante et rêveuse, séduit les lecteurs du monde entier. À travers Anne, Montgomery raconte l’enfance avec une douceur poétique, mêlée à une subtile critique des conventions sociales.
Le roman, tout en célébrant la beauté de l’Île-du-Prince-Édouard, impose l’auteure comme une voix majeure. Les lieux décrits deviennent des destinations touristiques, et la petite maison aux pignons verts attire chaque année des milliers de visiteurs.
Un style entre lumière et mélancolie
La plume de Montgomery oscille entre la légèreté et la gravité. Si ses romans regorgent de paysages enchanteurs, ses récits sont aussi empreints de nostalgie. Loin de l’image parfaite d’Anne, sa vie personnelle est marquée par des tragédies. Sa foi presbytérienne, qu’elle questionne à plusieurs reprises, et ses combats contre la dépression transparaissent dans ses écrits. L’auteure nous montre que l’émerveillement peut côtoyer l’amertume.
Vie privée et complexité des sentiments
Montgomery épouse en 1911 Ewen MacDonald, un pasteur presbytérien. Mais leur mariage est compliqué. MacDonald souffre de troubles mentaux, ce qui pèse lourdement sur la famille. Leur relation, marquée par des crises de dépression, laisse Montgomery seule face à ses difficultés. Dans ses journaux intimes, elle se confie, exprimant le poids de ses responsabilités et de ses rêves déchus. Cette facette moins connue de sa vie éclaire d’un jour nouveau ses écrits.
Une œuvre riche et variée
Montgomery ne se contente pas d’Anne et écrit de nombreux autres romans, comme les séries Emily et Pat. Elle publie aussi des centaines de nouvelles et de poèmes. Bien que ses écrits pour jeunes filles soient ses plus célèbres, elle aspire à toucher un public plus large. Des thèmes tels que l’amour perdu, la quête d’identité et le lien spirituel avec la nature apparaissent fréquemment.
Adaptations et impact culturel
Le succès de Anne traverse les décennies, notamment grâce aux nombreuses adaptations : séries télévisées, films et pièces de théâtre. La série récente Anne with an E, co-produite par Netflix, a redonné un souffle nouveau à l’œuvre, en y ajoutant des thèmes modernes comme l’acceptation de soi et les luttes sociales.
La notoriété de Montgomery s’étend au-delà du Canada. Ses romans sont traduits en plusieurs langues, et son influence littéraire est reconnue internationalement. Même Mark Twain qualifiait Anne de « l’enfant le plus adorable depuis Alice » de Lewis Carroll. Une consécration rare pour une écrivaine de son époque.
Une fin de vie tourmentée
Les dernières années de Montgomery sont sombres. La Seconde Guerre mondiale la plonge dans l’angoisse, et sa santé mentale décline. Le 24 avril 1942, elle est retrouvée morte dans son lit. La cause officielle est une thrombose, mais des théories suggèrent qu’elle pourrait avoir mis fin à ses jours, épuisée par la dépression et le stress de ses obligations familiales.
Un héritage littéraire indélébile
Aujourd’hui, l’œuvre de Lucy Maud Montgomery continue de vivre. Des festivals, des lieux de mémoire et des colloques célèbrent son génie. Ses écrits, qu’on croyait légers, révèlent une complexité qui résonne encore. L’Île-du-Prince-Édouard, patrie d’Anne Shirley, reste un lieu de pèlerinage pour ses admirateurs. Montgomery nous rappelle, à travers ses histoires, la beauté de la nature et la force des rêves, même dans les moments les plus sombres.